
En 2017, la Cour de cassation a tranché : la mention d’un sexe neutre ne peut figurer à l’état civil français. Cette décision repose sur une interprétation stricte de l’article 57 du Code civil, qui ne prévoit que les catégories « masculin » ou « féminin » lors de la déclaration de naissance.Cette position judiciaire s’oppose à certaines revendications portées par des personnes intersexuées ou leurs représentants, confrontés à l’impossibilité d’obtenir une reconnaissance administrative conforme à leur situation biologique. La règle légale, ainsi confirmée, continue de susciter des débats sur l’adaptation du droit aux réalités contemporaines.
Plan de l'article
- Ce que dit l’article 57 du Code civil sur la mention du sexe à l’état civil
- Pourquoi la Cour de cassation a refusé la mention de sexe neutre : analyse de la décision
- Enfants intersexués : quelles conséquences concrètes après ce refus ?
- Vers quelles évolutions possibles pour la reconnaissance du sexe à l’état civil en France ?
Ce que dit l’article 57 du Code civil sur la mention du sexe à l’état civil
Le contenu précis de l’article 57 du Code civil s’impose comme une boussole à tous ceux qui rédigent un acte de naissance : impossible d’y échapper, tout doit être consigné selon ce cadre. L’officier d’état civil indique le sexe de l’enfant, mais le choix reste verrouillé : « masculin » ou « féminin ». Nulle place à une variante, ni au « sexe neutre ».
Il en va de même pour les parents, désignés sur l’acte comme père et mère uniquement. Aucune place pour le terme « parent biologique » ou tout autre mot, même en cas de situation atypique ou de revendication plus inclusive. Ce dispositif ne fait pas dans la demi-mesure : la filiation française reste structurée autour de ce binôme, quelles que soient les réalités familiales ou médicales derrière les prénoms.
| Élément | Obligation prévue par l’article 57 |
|---|---|
| Sexe de l’enfant | Masculin ou féminin exclusivement |
| Filiation | Mention du père et de la mère uniquement |
Les agents d’état civil, tenus à cette rigueur venue du XIXe siècle, ne disposent d’aucune marge pour moderniser les termes. Quand une demande sort du duo traditionnel, la réponse se fait sans appel : le texte prévaut. Même les familles confrontées depuis des années à cette barrière l’ont constaté devant les tribunaux. Les juges eux-mêmes rappellent la règle et ne l’assouplissent pas.
Pourquoi la Cour de cassation a refusé la mention de sexe neutre : analyse de la décision
L’année 2017 a réveillé bien des espoirs : la cour d’appel de Montpellier, en optant pour la mention « sexe neutre » sur l’état civil d’un adulte intersexué, créait un précédent marquant. Mais cette avancée a été stoppée net, le parquet ayant aussitôt contesté la décision. Du côté des juges suprêmes, la reprise du dossier n’a laissé aucune ambiguïté : la solution s’est arrêtée sur les mots « masculin » ou « féminin ».
La Cour de cassation a considéré que l’article 57 du Code civil ne laisse aucune brèche. Ce que le législateur n’a pas écrit, le juge ne saurait l’introduire. D’après la haute juridiction, tout le droit civil est imbriqué autour de ce repère binaire. Modifier la mention du sexe, ce serait transformer les bases mêmes de la parenté, du nom, du statut de la personne. Une telle révolution, selon la Cour, n’appartient qu’au législateur.
Dans ce climat, l’arrêt favorable a été annulé et l’affaire renvoyée devant la cour d’appel de Toulouse, sans que les interventions d’associations ou de collectifs citoyens ne détournent l’issue. Le droit reste ancré : la mention neutre ne franchira pas le barrage du Code civil, du moins pas par la voix des juges.
Enfants intersexués : quelles conséquences concrètes après ce refus ?
Le maintien du refus d’une mention « sexe neutre » écarte toute forme de reconnaissance administrative, dès la première déclaration. L’acte de naissance, verrouillé par l’article 57 du Code civil, demande de choisir : « masculin » ou « féminin », rien d’autre. Or, dans certains cas, la réalité biologique ou chromosomique de l’enfant ne colle pas à cette binarité rigide.
Côté filiation, l’obligation reste absolue : seule la distinction père/mère est acceptée. Aucune place pour deux mères, deux pères ou un terme neutre, sauf par procédure d’adoption. Même le changement ultérieur de sexe à l’état civil ne bouscule pas cette règle. Si un parent transgenre n’a pas accouché, il ne pourra pas être désigné « mère biologique » ; l’inverse s’applique également.
Dans la vie quotidienne, cette absence de flexibilité expose les familles à toute une série de difficultés concrètes : inscriptions à l’école, accès à certains soins, gestion des dossiers sportifs ou périscolaires… À chaque étape, on retombe sur le filtre du binaire, qui ignore la diversité réelle de certains parcours. Médecins, juristes et associations butent sur cette rigidité, alors que la variété des situations se fait entendre dans la recherche, les témoignages et le débat public.
Vers quelles évolutions possibles pour la reconnaissance du sexe à l’état civil en France ?
La logique binaire perdure dans les textes, même si quelques avancées sont apparues. Depuis la loi du 18 novembre 2016, toute personne majeure ou mineure émancipée peut demander la modification de la mention du sexe, sans nécessité de subir traitement ni chirurgie. Cette évolution, inscrite dans l’article 61-5 du Code civil, reconnaît le caractère intime de la démarche et consacre l’autodétermination.
Pourtant, le droit n’ouvre pas la porte à une mention « neutre » ou « non binaire ». Malgré plusieurs condamnations internationales reprochant à la France un manque d’ajustement en matière de respect de la vie privée, et de nombreux avis institutionnels plaidant pour une évolution, le législateur n’a, à ce jour, engagé aucune réforme d’ampleur. Praticiens, juristes, chercheurs et représentants de la société civile continuent d’alerter sur les effets de ce statu quo. Les changements restent discutés mais ne se concrétisent pas.
Pour faire le point sur la situation et les débats en cours, on peut retenir les aspects suivants :
- Suppression de l’exigence d’intervention médicale : un pas décisif pour l’autodétermination personnelle.
- Aucune reconnaissance du sexe neutre, ni de mention alternative au duo classique.
- Des recommandations françaises et européennes appellent à une réflexion, mais la loi ne bouge pas.
Pas de bascule soudaine, le modèle français avance prudemment sur ces sujets. Difficile de savoir si le changement viendra d’une impulsion institutionnelle, d’une vague associative ou de l’agitation citoyenne. Mais le débat, lui, refuse de s’éteindre.






























